« — Je veux que tu gardes à l’esprit que ces prochains jours, ces prochaines semaines peut-être, seront différents de ce que tu as connu avec moi jusqu’à présent. Tu le sais. Il n’y aura pas de moments câlins ni de moments autres. Je l’ai décidé ainsi, pour te ramener à l’essence même de la soumission la plus extrême. Ta satisfaction sera de servir, ton plaisir sera ma jouissance. Tout le reste te sera ôté.
Bien sûr tu conserveras ton droit de parole. Tu auras la possibilité de t’exprimer sur tous les sujets qu’il te semblera nécessaire d’aborder pour parfaire ta condition ou avancer dans tes réflexions. Il te faudra au préalable en faire la demande. Tu ne me feras pas perdre de temps en babillages inutiles ou complices. Je respecterai toujours l’engagement que j’ai envers toi de m’assurer que tu vas bien. Qu’il s’agisse de ton corps mais aussi, et surtout, de ton mental. De ton esprit.
Je sais qu’il t’arrive parfois de perdre pied et de craquer pour des détails. Je veux que tu sois vigilante face à ces faiblesses qui sont tiennes, et que tu apprennes à te contrôler. Quelles que soient les circonstances. Je vais t’éduquer en ce sens, et donc, tu l’auras compris, te mettre face à des difficultés. Aucunement pour te mettre en échec, mais afin que tu progresses. Je ne te demanderai rien qui soit hors de ta portée, garde toujours cela à l’esprit. Si je te l’ordonne, c’est que tu en es capable. Répète-toi ces mots jusqu’à ne plus avoir d’hésitation ou de doute.
Je ne t’imposerai pas le bâillon en permanence car j’aime avoir ta bouche disponible à chaque instant, mais tu le porteras régulièrement, ainsi que l’écarteur. Je sais qu’il est très difficile à supporter sur de longues périodes, mais tu t’en sortiras très bien, j’en suis sûr. Tout cela pour bien que tu aies toujours à l’esprit que j’attends de toi que tu gardes le silence. Et que j’aime te contraindre. Je vais te traiter en esclave. Rien de plus qu’une esclave que je dresse et que j’éduque dans le seul but de me satisfaire pleinement, de me servir parfaitement, et de me procurer du plaisir mieux qu’aucune autre. C’est la condition que tu as voulue et pour laquelle tu m’as supplié. Ne l’oublie pas.
Une esclave n’est ni une amante ni une compagne. Elle est un corps que son maître possède et dont il fait ce qu’il veut au nom du lien puissant qui unit maître et soumise. Lorsque je n’aurai pas besoin de toi, tu resteras en retrait, et pas forcément en ma présence. Je ne te garderai pas toujours aux pieds. Tu devras l’accepter. Je sais que tu n’es pas habituée à de tels traitements. Tu es généralement une soumise plutôt choyée et bien traitée. Trop peut-être. Ici tu auras des moments de solitude qui te pèseront. Tu devras les mettre à profit pour méditer sur ta condition.
Tu n’auras aucun autre droit que celui-là lorsque tu seras seule. Pas de portable, pas d’accès Internet ni de livre. Rien. Juste toi, face à tes convictions. Face aux engagements que tu as pris. Tu vivras ces moments comme des épreuves au début, mais peu à peu, tu comprendras le sens et l’intérêt de cette méditation. Par la suite, ils te seront indispensables. Tu sais que je ne fais jamais rien sans raison. Chaque moment, chaque situation seront ritualisées. Tu devras te souvenir de tout, faute de quoi tu seras sanctionnée. Durement. Tu sais que je n’aime pas répéter. »
Extrait du roman Abnégation publié aux éditions Tabou.
